Dix sept ans plus tôt ● Les gouttes de pluie s'écrasaient à un impact régulier contre la toile de ton parapluie. Ce ploc te rappelait les tic-tacs incessants de l'horloge du salon. Tu regardais couler ces gouttes le long des baleines, en attendant qu'elles finissent leur course pour s'écraser sur tes chaussures cirées. Si on y pense, cette activité n'avait pas grand intérêt, mais sur le moment cette activité te paraissait indispensable. Tu ne voulais pas regarder le spectacle macabre qui se déroulait devant toi, tu ne voulais pas ne serait-ce qu'apercevoir le corps, ni le visage de la personne qui reposait dans le cercueil de verre. Tu sentis la main glacée qui te tenait, se serrer plus ferment.

Tu savais que ta mère désirait que tu restes digne, droit et fier même dans les circonstances les plus graves. Tu la regardas, son maquillage était impeccable, prouvant une de fois de plus ce qu'on entendait de plus d'elle dans les magazines. Arianna  Bradshaw était réputée pour être une femme insaisissable, froide et sans cœur, une véritable Dame de Glace incapable d'éprouver la moindre émotion. Si tu n'étais pas filmé et que cette femme n'était pas ta mère, tu l'aurais surement giflé, frappé, voir roué de coups pour qu'elle ne ressente ne serais-ce qu'un infime extrait la douleur que tu éprouvais en ce moment. Mais malheureusement, tu ne pouvais pas alors tu te contentas de suivre ses exigences silencieuses. Tu te redressas et levas le menton pour assisté à la scène qui se déroulait devant toi.

On enfonçait une cage de verre dans les tréfonds de la terre, cette cage protégeait un corps masculin sans vie, celui de ton frère. Tu aurais préféré ne rien voir, tu aurais voulu garder de lui un souvenir plein de vie. Tu ne voulais pas oublier ce beau sourire qui t'avait réconforté un nombre incalculable de fois et qui était maintenant une simple ligne inexpressive. Tu ne voulais pas oublier ces yeux qui brillaient d'une rage de vivre, d'une rage de vaincre tels deux brasiers ardents, qui se sont aujourd'hui éteints. Il y aurait temps de chose que tu aurais voulu garder de lui que si tu avais à en faire la liste tu en aurais encore pour une éternité.  Mais ces rebelles te l'avaient volé, il t'avait pris la personne à laquelle tu tenais le plus au monde, ils l'avaient assassiné, ces enfoirés. Les larmes s'amassèrent à tes yeux, tu clignas plusieurs fois les yeux dans le but de calmer ce flot incessant, mais cette tentative était veine et elles allèrent choir sur tes joues pareilles à un déluge.

Des ongles percèrent la paume de ta main avec force qui laissèrent couler un liquide vermeil, c'était le deuxième rappel à l'ordre, tu t'y attendais, tu avais une fois de plus fait acte de faiblesse. Tu regardas pour la seconde fois ta mère, elle te scrutait également laissant tomber une seconde, son masque, le temps que tu aperçoives qu'elle aussi, elle ressentait cette perte, c'était tout de même son fils qu'elle venait de perdre, et tu compris enfin, les raisons de son comportement. Pour elle, il n'était pas question de donner à ces rebelles ce qu'ils voulaient, ils ne faillaient par leur montrer que leurs actions vous touchaient. Il fallait plutôt être solide et imperturbable. D'un revers de la main, tu essuyas les larmes de ton visage, ton visage se crispa dans un rictus qui n'inspirait rien de bon. Ce fut le signal pour ta mère, vous vous avançâtes, mains dans la main, on vous tendit une rose noir que vous primes pour finalement la jeter sur le cercueil. La rose rebondit dessus y laissant la trace pourpre de ton sang. Cette fleur et cette tache étaient une promesse, la promesse d'une vengeance sanglante.

Il y a trois minutes●  Ton poing cogna la tête de ce pauvre demeuré avec une force et une rage que tu n'avais pas pu contrôler, sa tête vola en arrière laissant sortir de sa bouche, telle une éruption, un immense flot de sang rouge. Tu t'essuyas la main d'un geste brusque laissant le liquide gicler sur le bitume sombre. « Je vais répéter une dernière fois ma petite question, où se cache le groupuscule de rebelle ? » ta voix était forte, c'était un rugissement qui sortait de tes entrailles. L'homme qui se tenait en face de toi, éclairé par une faible lumière, se mit à rire, un rire sonore qui n'annonçait rien de bien pour lui. Tu ne cherchas pas à en obtenir plus, une dizaine d'autres rebelles attendait patiemment d'être interrogée, d'un claquement de doigts, Grahyèna se jeta sur lui avec férocité. Elle enfonça ses canines dans le cou de ce foutu rebelle, étouffant ainsi son hurlement en un espèce de glouglou qui te rappelait le bruit de la confiture de framboises qui mijotait autrefois dans la marmite de ta gouvernante. Un sourire carnassier releva le bout de tes lèvres « emmené moi le suivant s'il vous plaît et ne nettoyer pas ceci ... » dis-tu en désignant le cadavre «... ça leur montrera ce qui les attend s'ils s'entêtent à avoir la langue bien pendue » et tu t'enfonças dans les ténèbres.

Tu ouvris les yeux dans la pénombre, tu étais dans ton lit, loin des sous-sols miteux où se déroulaient les interrogatoires, tu plaquas ta main sur tes yeux et lâchas un soupir, ce qui eut pour conséquence d'éloigner le doux relent de ton ancienne vie un peu plus profondément dans ton esprit. Tu ne faisais plus partie de la Garde, ceci n'était qu'un simple flashback d'une de tes nombreuses actions au sein de celle-ci. La Garde : tu l'avais rejoint peu de temps après l'assassinat de ton frère, il y a seize ans. Tu voulais le venger et donc, t'engager dans cette organisation te semblais le seul moyen pour y parvenir tout en répandant l'ordre et la justice. Tu estimais l'avoir plutôt bien fait comme le témoignait les nombreux cadavres de rebelles qu'on avait grâce à toi enterrés ou fait disparaitre. Tu ne faisais plus partie de la Garde, ceci n'était qu'un simple flashback d'une de tes nombreuses actions au sein de celle-ci. En onze ans, tu t'étais montré comme un très bon élément pour la Garde, on t'a mainte fois félicité pour tes différentes arrestations de rebelles, ton escouade et toi furent plusieurs fois décorés par la présidente elle-même si bien qu'on te proposât d'intégrer la division rouge. Tu aurais pu accepter, mais tu sentais que ce n'était pas pour toi alors quand tu refusas, on revint plus tard avec une bien meilleure proposition : une place au sommet du Colisée. Que tu pris immédiatement, tu avais toujours été fasciné par ce symbole de pouvoir du gouvernement et puis les combats pokemons étaient aussi l'une de tes grandes passions. Tu adorais ce poste d'assistant organisateur, il te permettait d'élever l'exécution de rebelle à un niveau bien plus haut qu'un simple combat à mort car oui, avec toi, ces exécutions devenaient un art de toute beauté, de véritable spectacle grandiose que tu adorais mettre en scène . Des lèvres se pressèrent soudainement sur tes joues te faisant sortir des méandres de ton esprit. Greyson : la personne avec qui tu étais fiancé depuis cinq ans. Cet homme était parfait, qu'est ce que tu pouvais dire de plus, il était intelligent, drôle, sensible, beau. Tant de pâles adjectifs qui n'arrivaient pourtant pas à faire ressortir sa perfection. Tu fis un tour sur toi-même pour te retrouver entre les deux yeux de ton amant. " Tu n'es toujours pas parti sauver des vies ? " tu ne lui laissas pas le temps de répondre et commença à le recouvrir de baisers, tu étais content qu'il soit encore à tes côtés. Cette journée commençait bien.

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