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 arthur ≈ la nausée.
Hope is stronger than Fear

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MessageSujet: arthur ≈ la nausée.   arthur ≈ la nausée. 983836horlogeDim 5 Avr - 1:56

arthur et alan


Il l'avait insulté, pour ne pas changer et pour ne pas faire honte à sa royale renommée Alan lui avait fait un glorieux doigt d'honneur en se promettant intérieurement qu'un jour il aurait sa revanche en joute verbale. Chez les mineurs, on se conduisait pas avec un petit doigt levé, chez les mineurs on savait pas dire les choses poliment. C'était brutal, c'était violent, et c'était probablement ça qui avait empêché irrémédiablement Beckett de se barrer en claquant la porte, tout en pestant contre les fumées dégueulasses qui sortaient parfois des tunnels assombris. Ils étaient des créatures de la nuit, et ce depuis toujours. Ils étaient présents sous la ville, à entendre chaque brouhaha, à compter tout bruit louche pouvant leur affirmer qu'ils allaient claquer sous les gravats, comme des héros. N'empêche que, qui allait bien se souvenir d'eux ? Les cas isolés ? Les cachés pour mieux les oublier après ? Qui allait leur creuser une tombe si ce n'est leurs proches ? C'est en songeant à cette énième idée lugubre que le malmené par l'émeute d'y'a six ans pousse un soupir tout en retenant un rire sec en coin de lèvres. La sueur coulant de son front, il savait pas trop depuis combien d'heures il était entre les pierres branlantes, suppliants les bourreaux d'arrêter leur massacre qui durait depuis une éternité - si ce n'est plus. Même s'il a le sourire aux lèvres, celui-ci est trompeur et pour cause ; d'une humeur de chacal il l'est et ça, depuis plusieurs jours déjà. Ayant paumé son précieux carnet, il avait gueulé sur à peu près tout le monde dans l'assemblée minable. Sans aucune réponse. Et pour une fois il avait eu droit au respect qui se méritait, aucune âme bonne avait daigné lever la main pour le dégager de son doute ; s'il devait s'en prendre à quelqu'un, c’était à lui-même et mis à part ruminer il savait pas faire grand-chose. Il était pas bien jojo son petit cahier, il en avait subi des sales guerres qui voulaient rien dire, il s'en était bouffé du café bouillant et de la pluie acide ; pourtant il avait survécu. Il était à l'image de son propriétaire, bouffé, craché, répugnant à souhait. Pourtant l'intérieur il renfermait des tas de secrets dont le surnommé Deverre a encore les clefs. Ou peut-être pas. Qui sait qui avait pu tomber dessus ? En son for intérieur, le pauvre se disait qu'il avait été brûlé comme toute erreur de la nature. Oui il y croyait, et c'était la seule chose qui arrivait à le retenir de gueuler envers les autres. Dedans y'avait ses mots, ses phrases, ses tournures alambiquées et ses sous-entendus mal placés, y'avait des odes à la liberté, des admirations envers d'autres de ses pairs. Y'avait de tout, surtout de rien en fait, mais pas mal de tout. Un morceau de son passé, des déblatérations pour le futur, un bon gros ramassis de conneries en somme, sauf qu'en plus y'avait les tripes du poète bafoué, de l'aveugle à moitié. Et c'était ça qu'était douloureux dans cette idée d'avoir perdu un bibelot aussi éphémère ; c'est qu'il y avait tout mis depuis près de six ans, depuis qu'il avait perdu la vision complète, depuis que ça avait éclaté dans le coeur de la mine. Soupirant en y songeant, le dos de sa main se glisse sur son front pour se débarrasser des quelques gouttes qui menacent de glisser. A côté de lui, Samuel sa créature aux griffes acérées continue machinalement son boulot ; pour peu il pourrait croire que c'est un robot envoyé par les riches pour les surveiller eux, les raclures du fond de l'assiette, les corbeaux qui s'installent sur des cotes pour bouffer le cadavre encore tout frais d'un gosse enroulé dans de la soie. « Bah mon vieux, t'as l'air survolté aujourd'hui. » Sa seule réponse reste un petit râle compatissant de sa créature qui lui jette une oeillade débordant d'une bonté que l'homme dans ce duo ne soupçonnait même pas. C'est assez fou qu'autant de gentillesse réside dans un seul petit être, surtout que y'en a de chez eux qui sont pas bien beaux ; n'empêche que leur loyauté n'est plus à remettre en cause, contrairement à ses congénères qui eux peuvent trahir, faire mal, dominer tout univers pour mieux le faire plier.

Et il bosse, bosse sous la lumière blanche et grésillante des loupiotes qui ont été mises ici puis là, juste histoire de leur donner un peu de joie dans la gueule des ténèbres. Jusqu'à ce que ça sonne, que le gong claque contre les parois humides et qu'il puisse souffler un enfin définitif, lassé d'avoir à frapper contre la roche pour en trouver d'autres, et encore d'autres, et encore d'autres, jusqu'à un petit magot de pirates dégénérés. Pinçant sa lèvre inférieure, Alan fait signe à son compagnon de le suivre par le biais d'un petit coup de menton, et laissant tomber tout son matos au sol il remonte ses manches par la suite pour mieux se diriger vers l'extérieur. Qu'elles sont bonnes et plaisantes les pauses pour l'employeur acharné qui sature d'entendre ses muscles se plaindre, qu'elles sont douces et délicates, surtout quand il est possible de sentir un petit courant d'air claquer contre la joue. Si Beckett est du genre à râler le plus clair du temps, il crache pas non plus sur un petit instant suspendu dans les airs qui lui rappelle à quel point ils doivent se bouger les miches pour éviter de crever la dalle dans le caniveau. Surtout que c'est pas bien beau à voir les alentours, y'a pas grand-chose en matière de verdure et vaut mieux même pas s'étaler sur les piafs qui sifflent. Rejoignant son groupe de galériens qui cherche à remonter à la surface, il se met à taper du pied sur la grille presque avec impatience. Le truc quand on est parmi les nécessiteux, c'est qu'on arrive à se contenter d'un rien pour faire gonfler le coeur de manière si grosse que parfois on a la sensation qu'il va éclater. C'est que le bonheur en plus d'être éphémère, ils arrivent à le trouver partout. Même si le cas du trentenaire reste particulier, c'est sa vision à lui de la cité et peu importe si les chimères sont trompeuses, si ses illusions lui rabattent les oreilles en lui confirmant qu'un lit taillé pour les rois lui déplairait pas. Il les écoute pas. Il fait le sourd, parce qu'il s'avère plutôt fort pour ce jeu vicelard entre lui et sa conscience qui l'emmerde avec sa logique qui vaut pas des clopinettes. « Bordel. » Qu'il souffle naturellement en frémissant sous les rayons du soleil qui alimentent encore un peu ses vieux os lacérés. Ses paupières se ferment presque sous le contact indolore mais puissant qui opère. Véritable atteinte sur le piédestal réservé aux titans, il se reprend en sentant la foule dégager de l'ascenseur pour se retrouver dans la petite bâtisse à peine plus loin. Presque une bicoque acceptable si elle avait pas tant de graffitis dessus et si elle était plus colorée. Grinçant des dents à la vue de la cage rouillée, il préfère largement poser son cadavre purulent sur le trottoir à peine plus loin. On fait pas gaffe à lui, on fait gaffe à personne ici. Passant sa main droite sur la tête du Sablaireau affamé, il glisse l'autre dans sa sacoche délavée pour en sortir quelques baies pour le bestiau qui le remercie d'un mouvement de tête presque gracieux. De son côté, Beckett préfère lourdement s'attarder sur une bouteille de flotte qu'il s'enfile sans plus de cérémonies ; les politesses ça veut plus rien dire, à part bonjour et au revoir, le bon appétit pompeux c'est pour ceux qui ont encore la chance de pouvoir dire qu'ils ont de bons steaks plantés dans la fourchette. Inspirant profondément d'aise, après s'être alimenté en eau, il fouille un peu plus dans le fond de son accessoire pour y trouver un pain tout ce qu'il y a de plus banal et de moins cher aussi. Pas de quoi vous tenir une décennie, néanmoins ça vaut ce que ça vaut et pour remplir un estomac creux, y'a rien de mieux qu'un peu de blé tassé. Croquant dedans, Alan laisse ses jambes s'étaler en longueur sur le béton factice tissé par cet eldorado superficiel. On lui fout la paix, et ça, ça a pas de prix. Ou pas. La transe avec cette paix bidonne ne dure que quelques secondes, une ombre gâche son horizon déjà décoré par l'astre en fusion. Grimaçant quelque peu à cause du changement brusque que son oeil encore valide supporte mal, l'autre de verre doit renvoyer un peu de reflet, et là, l'objet de tous ses désirs apparaît comme par magie. Sauf qu'il est entre des doigts qu'il apprécie pas spécialement, ou du moins ; il aurait jamais pensé à lui. Sixsmith le rêveur mort-né, l'idéaliste avorté et surtout le muet de ces dames qui lui tend son carnet qu'il pensait déjà croqué par des Caninos. Rien que pour pousser l'attente à outrance, l'ours mal léché passe le bout de sa langue sur ses lippes asséchées avant de faire passer sa bouffe le long de son oesophage. Il hausse les sourcils puis, posant la nourriture sur ses genoux il attrape sèchement son jardin secret. « Bonne lecture au moins ? J'serais triste d'avoir une mauvaise note et d'être mal perçu par toi. » Son timbre ironique, reniflant la mauvaise volonté s'esclaffe sur bien des kilomètres, si bien que Samuel en retient un rire amusé. Alors Deverre se met à dévisager le jeune mineur qu'est même pas plus ancien que lui, c'est juste l'expérience qui les sépare, c'est à cause de ça que pour lui c'est qu'un gamin prenant des aises. « Avant qu'tu t'barres, t'as intérêt à m'filer des explications. » Les traits durcis par une certaine incompréhension, c'est son palpitant qu'a du mal à suivre la cadence puisqu'il se serre, se pince avec une douleur qui l'énerve plus que de raison. Ne pas avoir le contrôle sur une situation ; c'est une chose, se plonger tête la première dans les affaires du rebellé ; c'en est une autre. Surtout venant de lui, lui qu'a déboulé avec ses grands yeux bleus hagards, lui qui s'affale dans un coin sans causer, lui qui élève un point d'interrogation au-dessus de sa tignasse en foutoir. Lui qu'il connaît pourtant depuis cinq ans. L'étranger, l'ermite et la muse aussi, muse aux ailes déchiquetées, à la peau tachée par les vapeurs noires, la muse des temps modernes. Le martyr, son martyr sacrifié sur l'autel des outragés.
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arthur ≈ la nausée.

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